Ô Kairos !

Vous connaissez Kairos ?

C'était le dieu du moment opportun. Celui qui tranchait avec son rasoir au bon moment et au bon endroit une situation où l'issue paraissait incertaine. Quand un événement  basculait de manière inattendue dans le bon sens, les grecs remerciaient Kairos.

C'est un personnage étrange et peu connu. Il a des ailes aux pieds comme Hermes. Il se promène sur une roue en bois. Peut être la roue de la fortune ? Aujourd'hui, à l'heure des matériaux composites, on dirait une roue de fortune... Et il a une grande mêche de cheveux toujours dirigée vers l'avant. Il est par essence insaisissable. C'est le dieu des coups de théâtre, de l'heureuse surprise. C'est le dieu épatant du soulagement. Au moment de son passage, les yeux s'écarquillent, les respirations sont suspendues et puis on dit : Ouf ! 

C'est valable dans une discussion, quand une personne trouve les mots pour apaiser une crispation proche du dérapage.

Rien a voir avec l'opportunisme.

Depuis que j'ai découvert ce dieu grec, j'aime observer les instants où quelque chose arrive à point nommé. Les moments opportuns pour agir, pour parler. Il reste à méditer à chaque endroit ce qui est, ou serait, opportun. Une belle matière de réflexion à glisser dans sa musette.  Sur votre lieu de travail, par exemple, il y a toujours une minute où vous n'avez personne sur le dos. Et bien, c'est le moment de faire une grêve sauvage. Une minute pour le plaisir de laisser couler du temps pour rien. Ressentir pleinement cette parenthèse suspendue dans l'existence. Vous pouvez vous offrir cette minute contre toutes les dominations qui vous gonflent régulièrement. Et puis, hop ! le travail reprend. Merci Kairos, ni vu ni connu, vous avez gagné un instant de paix. Il faut essayer. C'est amusant. Surtout en ce moment, ça peut servir.